Contrat d’entreprise – Une complexité à ne pas sous-estimer

Les contrats d’entreprise, qu’ils soient basés sur des prix unitaires, un prix forfaitaire ou un prix global, sont souvent au cœur de projets d’envergure. Leur complexité peut toutefois engendrer des difficultés majeures si certaines notions ne sont pas clairement définies.

Les différents modèles de prix : des nuances cruciales

Prix unitairesCe modèle fixe un coût pour chaque prestation (par exemple, un prix par mètre carré, mètre cube, etc.). La valeur totale du contrat n’est pas déterminée à l’avance, mais dépend des quantités réellement exécutées. Ce modèle offre une grande flexibilité, mais exige une rigueur extrême dans le suivi et la documentation des quantités pour éviter les litiges.
Prix forfaitaireCe modèle fixe un prix unique pour l’ensemble d’un projet, quelles que soient la durée ou les ressources finalement utilisées. Il offre une certaine sécurité financière, mais peut devenir problématique en cas d’imprévus ou de modifications. Le descriptif du projet est ici l’élément essentiel pour que toutes les parties sachent précisément ce qui doit être fait et à quel prix.
Prix globalDéfini par la norme SIA 118, le prix global se distingue par sa capacité à être ajusté. Il s’agit d’un prix initial fixe, susceptible d’évoluer pour tenir compte des variations économiques, comme l’inflation ou le renchérissement. Diverses méthodes permettent de déterminer ces ajustements (indice des coûts de production, pièces justificatives, etc.).

Les revendications et le principe de la preuve

Les revendications, qu’elles soient liées à des retards, à des défauts de construction ou à des dépassements de budget, sont une source fréquente de litiges. Souvent, la formulation des clauses contractuelles n’est pas suffisamment claire pour permettre une résolution rapide des conflits.

Durant l’exécution des travaux, tant l’entrepreneur que le maître peuvent formuler des revendications (travaux supplémentaires, retards, défauts constatés, etc.). Selon la jurisprudence, ces revendications doivent être clairement formulées et dûment documentées, faute de quoi elles peuvent être considérées comme non établies. Le principe de la preuve (art. 8 CC) impose à chaque partie de démontrer les faits qu’elle allègue.

Dans ce contexte, un conseil juridique expérimenté permet de clarifier les termes du contrat, de sécuriser la rédaction et de minimiser les risques de contestations futures.

Clauses insolites et validité contractuelle

La jurisprudence du Tribunal fédéral (ATF 138 III 411 ; ATF 133 III 61) a consacré la théorie des clauses insolites, découlant de l’art. 2 al. 1 CC (principe de la bonne foi).

Une clause contractuelle qui, par son contenu, surprend objectivement une partie et désavantage gravement ses droits, n’est contraignante que si elle a été expressément portée à la connaissance de la partie concernée.

Dans le domaine de la construction, il s’agit notamment des exclusions générales de responsabilité ou des restrictions excessives aux droits de garantie.

Rupture unilatérale du contrat

Le maître de l’ouvrage dispose de la faculté de résilier unilatéralement le contrat d’entreprise en tout temps.

Lorsqu’un maître d’ouvrage résilie un contrat de manière injustifiée (art. 377 CO), l’entrepreneur peut réclamer non seulement le paiement des travaux déjà exécutés (damnum emergens), mais aussi l’indemnisation de son bénéfice attendu sur les travaux non encore réalisés (lucrum cessans).

Défauts apparents et cachés

L’entrepreneur répond des défauts de l’ouvrage. Le maître doit vérifier l’ouvrage dès sa livraison et dénoncer immédiatement les défauts apparents (art. 367 al. 1 CO). Pour les défauts cachés, la dénonciation doit intervenir sans délai dès leur découverte (art. 370 CO).

L’action en garantie se prescrit en deux ans pour les ouvrages mobiliers et en cinq ans pour les ouvrages immobiliers (art. 371 CO). Jusqu’à récemment, le propriétaire devait réagir immédiatement et décrire précisément le défaut sous peine de péremption. Le Parlement a corrigé cette situation délicate en introduisant un délai de 60 jours pour dénoncer le défaut constaté — cette nouvelle disposition entrera en vigueur le 1er janvier 2026.

La norme SIA 118 prévoit une solution différente : un défaut caché peut être annoncé dans les deux ans après la réception des travaux. Il s’agit d’un délai de garantie, applicable uniquement si la norme a été expressément intégrée dans le contrat.

Dépassement du devis d’architecte

Le devis établi par l’architecte ou l’entrepreneur constitue une estimation des coûts. Selon la jurisprudence, si le devis est nettement dépassé sans avertissement, le maître peut refuser le paiement des montants excédentaires.

L’architecte, agissant en qualité de mandataire au sens des art. 394 ss CO, a un devoir d’information et de fidélité envers son client : il doit avertir sans délai des risques de dépassement. Le manquement à cette obligation peut engager sa responsabilité contractuelle.

Un dépassement de 5 % est généralement jugé acceptable. Au-delà, il doit être justifié par des obligations liées aux règles de l’art ou par des circonstances imprévues. Si les plus-values résultent de décisions non nécessaires, elles peuvent être contestées.

Le juge évaluera alors l’intérêt du client à ces prestations supplémentaires pour déterminer le montant dû.

Pourquoi faire appel à un avocat ?

Face à ces enjeux, l’intervention d’un avocat spécialisé en droit de la construction ou en contrats d’entreprise n’est pas une option, mais une nécessité.
Il possède l’expertise pour :

Analyser les clauses du contrat et identifier les risques potentiels.

Négocier des termes équilibrés qui protègent vos intérêts.

Conseiller et représenter en cas de revendication ou de désaccord.

En somme, un conseil juridique préventif est toujours préférable à un procès coûteux et long. Il garantit que le projet se déroule dans un cadre légal solide, offrant sécurité et clarté à toutes les parties. Grâce à sa double qualité d’avocat et de notaire, Serge Métrailler offre une approche complète des contrats d’entreprise : la rigueur de la rédaction contractuelle et la stratégie juridique en cas de litige.

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